Sommet à Paris pour un nouveau pacte financier mondial : quels résultats pour l’Afrique ?

Sommet à Paris pour un nouveau pacte financier mondial : quels résultats pour l’Afrique ?

Les dirigeants internationaux réunis pour la cérémonie d'ouverture du sommet le 22 juin à Paris.

Rédigé par Laurence Soustras

Modifié le 26 juin 2023

Le sommet de Paris a été marqué par une prise de parole puissante des pays du Sud contre une architecture financière internationale qu’ils ne trouvent ni représentative ni efficace. Et l’Afrique y a fait entendre une nouvelle voix : celle d’un continent qui veut être assis à la table des décisions.

« Nous les avons entendus, mais ils nous ont aussi écoutés, car nous ne voulons plus être un continent où les gens se plaignent, où ils sont des victimes, où nous nous retrouvons dans un coin. Nous pensons que les Africains peuvent aller fièrement de l’avant vers le reste du monde pour travailler sur les défis auxquels nous faisons face et fournir des solutions ». C’est ce qu’a déclaré William Ruto, président du Kenya, en conclusion du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial qui s’est tenu à Paris la semaine dernière, exprimant ainsi un point de vue largement partagé par ses homologues africains. « L’Afrique ne devrait pas être perçue comme en quête de générosité, nous voulons être traités comme des égaux », a également insisté le président sud-africain Cyril Rhamaphosa qui exposait comment la délégation de sept chefs d’État africains, de retour de sa mission de paix en Ukraine et en Russie, avait rejeté là toute proposition d’aide alimentaire alors qu’elle exigeait seulement la réouverture des ports de la mer Noire, par où transitent les importations mondiales de céréales, notamment vers l’Afrique. 

Des annonces…

Face à l’état d’esprit sensiblement plus combatif des pays du Sud, le Sommet, convoqué par le président français Emmanuel Macron, a joué la carte du consensus avec quelques annonces : un financement de 2,7 milliards de dollars accordé au Sénégal pour soutenir sa transition vers les énergies propres, la restructuration de la dette zambienne s’élevant à plus de 6 milliards de dollars, en accord avec les créanciers chinois et étrangers du secteur privé, ainsi qu’un soutien mutuel des pays en cas de catastrophe naturelle, avec l’inclusion à venir dans les statuts des banques multilatérales de développement d’une clause de dette suspensive liée au climat. Il s’est agi également d’annoncer la réalisation de l’objectif de 100 milliards de dollars de réallocation des droits de tirage spéciaux du Fonds monétaire international aux pays les plus pauvres ou au renforcement des fonds propres de banques locales de développement. Même si pour le moment seulement 61 milliards ont été récupérés par le FMI.

Et de nouvelles pistes

Comme toutes les conférences de développement, le Sommet de Paris n’a pas échappé à l’écueil des promesses non remplies du passé auxquelles se substituent inlassablement de nouveaux programmes ou encore des « groupes de travail » et autres « mécanismes de suivi ». C’est ainsi qu’une nouvelle fois les chefs d’État africains ont demandé des comptes sur l’enveloppe de financement climatique de 100 milliards de dollars par an à l’horizon 2020 qui avait été promise aux pays en voie de développement lors de la COP 15 de Copenhague (lien :https://unfccc.int/resource/docs/2009/cop15/eng/11a01.pdf). « Ces 100 milliards n’ont jamais été délivrés et cela se détache comme une question qui doit être abordée », a insisté le président sud-africain, suivant une demande similaire de la part du président égyptien Abdel Fattah al-Sissi. Et le président français de reconnaître : « Nous demandons un suivi beaucoup plus étroit et opérationnel de ces 100 milliards de dollars de financement direct, car la situation n’est pas satisfaisante. »

Un appel au financement privé

Un bémol qui fait paraître comme hypothétiques les autres annonces, vu notamment qu’elles ne dépendent pas du seul secteur public. Il en est ainsi de l’annonce d’intention que chaque dollar de prêt des banques multilatérales de développement devrait être accompagné d’au moins 1 dollar de financement privé. L’idée est de permettre aux banques de développement de mobiliser 100 milliards de dollars par an de fonds privés et d’augmenter de 200 milliards de dollars par an leurs capacités de prêts sur dix ans. Avec pour objectif de pouvoir prêter à taux réduit aux nations les plus pauvres. Ces effets de levier vont-ils assurer à l’Afrique plus de dons et de prêts concessionnels ? C’est une question centrale, comme l’a souligné le Premier ministre éthiopien Abiy Ahmed :  le continent « a besoin de ces dons et prêts concessionnels, et sans eux nos défis interconnectés ne peuvent pas être traités. Ils exigent une masse considérable de ce type de financement et c’est la seule manière dont nous pouvons minimiser des crises additionnelles et nous concentrer sur les objectifs de développement ». Parmi les pistes envisagées pour dégager des ressources supplémentaires figure le projet d’une taxe internationale sur le transport maritime, une solution à laquelle jusque-là étaient opposés les États-Unis, mais que la secrétaire au Trésor américaine Janet Yellen a indiqué, en clôture du sommet, être prête à considérer.

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