À Paris, des manifestants dénoncent les sanctions de la CEDEAO au Niger

Face à l’impact des sanctions imposées au Niger par la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) en réponse au coup d’État, une grande partie de la diaspora nigérienne résidente en France est de plus en plus inquiète.
Début septembre, ils étaient une cinquantaine à avoir répondu à l’appel du mouvement Tous Pour La République et des Nigériens résidents en France. Brandissant, à proximité de l’ambassade du Niger à Paris, des drapeaux du Niger et des pancartes condamnant « toute agression contre le Niger », les manifestants ont exprimé leur soutien au peuple nigérien en dénonçant les sanctions prises par la CEDEAO depuis le coup d’État mené par l’armée nigérienne le 26 juillet dernier.
« Aucun peuple ne peut supporter cela »
Ces sanctions sont jugées illégales, illégitimes et inhumaines par les manifestants inquiets, qui craignent un isolement du pays déjà en proie à une situation économique difficile. « La fermeture des frontières entrave la circulation des médicaments et des produits de première nécessité, et nous considérons que même en temps de guerre, on doit laisser passer les vivres », estime Tiekoura Almoubarak, étudiant à la Sorbonne à Paris. « Aucun peuple ne peut supporter cela », scande-t-il.
Pour Ismaël Saidou Tankari, membre du directoire du mouvement à l’initiative de la mobilisation, les sanctions dans le pays auraient été prises dans le but d’« infliger des souffrances à notre population ». « Suite à ces sanctions, il y a eu des hausses de prix des denrées alimentaires : un sac de riz qui coûtait 11 000 FCFA avant les sanctions a grimpé, allant de 13 000 jusqu’à parfois 17 000 FCFA dans les jours qui ont suivis. Il y a également eu des coupures de courant, même dans la capitale où les gens n’avaient que maximum deux heures d’électricité par jour. Dans les hôpitaux aussi, des interventions chirurgicales ont dû être annulées par manque d’électricité », témoigne-t-il.
« Non à la guerre au Niger ! »
En plus des sanctions, le pays vit actuellement sous la menace d’une intervention militaire de la CEDEAO, évoquée dès début août par Abel-Fatau Musah, commissaire chargé des affaires politiques et de la sécurité de l’organisation. Une intervention armée vivement contestée par des manifestants scandant en cœur « Non à la guerre au Niger ! ». « Le chaos, on sait quand il commence, mais on ne sait pas quand il se termine », s’inquiète Halima Sanda, une manifestante. « Quand il s’agit d’un pays en Afrique, aujourd’hui c’est le Niger, on brandit la menace de guerre, on fait peur à la population. S’il y a le chaos au Niger, il y aura le chaos dans toute l’Afrique et s’il y a le chaos dans toute l’Afrique il y aura le chaos en Occident », regrette-t-elle.
« La souveraineté n’a pas de prix »
Contre toute intervention militaire au Niger, les manifestants s’opposent de fait à toute forme d’ingérence extérieure dans le pays. Pour eux, la souveraineté n’a pas de prix : « La CEDEAO décide de mener la guerre dans notre pays afin de rétablir un supposé régime démocratique, mais s’il était vraiment démocratique ce ne serait pas à la CEDEAO ou à la communauté internationale de le rétablir, mais ce serait au peuple nigérien », clame Ismaël Saidou Tankari dans un discours face à des manifestants déterminés et unanimes. « C’est à nous, le peuple nigérien de décider qui va diriger le pays, poursuit Assan, un manifestant. Maintenant que les militaires ont pris leurs responsabilités pour mettre l’ancien président dehors, la France se réveille comme un seul homme pour dire non. Qui soutiennent-ils finalement ? Le président Bazoum ou le peuple nigérien ? Pour nous, la priorité revient au peuple », revendique-t-il.
Pour les manifestants, il est désormais temps d’aller de l’avant en soutenant les nouvelles autorités pour le principe de continuité de l’État. « Ils ont déjà constitué un gouvernement civil et font en sorte que cette situation puisse être résolue de façon diplomatique sans qu’il n’y ait d’intervention militaire de la CEDEAO », estime Mustapha-Moudi Sanoussi, un manifestant.
« Tous unis, nous vaincrons ! »
Sous les « Tous unis, nous vaincrons ! » de l’assemblée, Ismaël Saidou Tankari a tenu à rappeler : « Si nous réussissons à traverser cette épreuve, cela veut dire que le Niger aura recouvré de manière définitive son entière souveraineté et son autonomie. Ce combat n’est pas facile et on ne pourrait l’imaginer sans le concours de la diaspora. »
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