Pointe-Noire : la COVID-19 dope le sport de maintien

Ouverture de nouvelles salles de sport à Pointe-Noire depuis l'épidémie de Covid-19 | Jean David Mihamle
Jean-David Mihamle
Les salles de sport se multiplient ces derniers mois à Pointe-Noire, la capitale économique du Congo. Dans un contexte de morosité sociale du fait de la COVID-19, le sport apparaît comme une bouée de sauvetage.
La fièvre du sport qui s’est emparée des Ponténégrins (les habitants de Pointe-Noire, capitale économique du Congo) ces derniers mois atteint généralement son paroxysme en fin de semaine.
Le lieu dit « côte sauvage » donne alors la mesure de cet engouement pour le sport de maintien. Des centaines de personnes s’emparent alors de la plage, souvent aux premières heures de la matinée. Seuls, en couple ou même en groupe, enfants, jeunes et adultes, hommes et femmes s’adonnent à des exercices physiques, de la course ou alors une simple marche.
Une aubaine pour Desty Nzila, coach sportif qui y recrute une bonne partie de ses adhérents au profit des diverses salles de sport dont il a la charge dans la ville de Pointe–Noire.
« Oui, je suis sollicité partout. Je ne travaille pas que dans une salle », explique-t-il.
« J’exerce dans plusieurs salles, je donne des cours à domicile et sur la plage. J’ai créé un concept, « no limit ». Ça, c’est un concept qui permet d’aider tous ceux qui n’ont pas les moyens… » Un abonnement dans une salle de sport de Pointe-Noire varie généralement entre 25 et 100 euros par mois. Une somme élevée dans un pays où la moitié de la population vit avec moins d’un dollar par jour d’après la Banque mondiale.
« No limit » ?
« No limit », le concept imaginé par le coach sportif répond justement au besoin de satisfaire le maximum de personnes. « J’ai constaté que beaucoup de personnes voulaient faire du sport, mais n’avaient pas toujours les moyens pour prendre un abonnement dans une salle, explique le coach sportif. C’est la raison pour laquelle je m’occupe ici (sur la plage, NDLR) de ceux qui n’ont pas suffisamment d’argent pour se payer un abonnement (entre 20 et 100 euros, NDLR). »
Aujourd’hui, l’intérêt des Ponténégrins pour le sport se voit à travers la multiplication des salles de sport dans la ville. Au-delà du centre ville, ces structures se créent déjà dans des quartiers périphériques comme Songolo, entre autres. Le soir venu on peut même apercevoir de nombreux adhérents en activité. « Il s’agit surtout des cadres d’entreprise qui se défoulent après une journée de dur labeur », relève le coach Desty Nzila qui a déjà « enregistré une dizaine de salles de sport dans la ville contre trois, il y a un an ».
Déjà 50 coachs !
En dehors de quelques grands hôtels dotés de salles de gymnastique, « la ville compte déjà dix salles de sport, dont deux nouvelles ouvertes cette année », révèle le coach sportif. Une croissance rapide qui nécessite aussi la présence d’un personnel qualifié. « Une association des coachs de sport est en gestation à Pointe-Noire, mais les querelles d’ego freinent son envol », regrette l’encadreur qui dénombre déjà 50 coachs dans la ville.
Les profils de formation sont différents. Certains comme Desty Nzila ont été formés sur place au Congo par des mentors. D’autres sont issus de centres de formation à l’étranger comme en Afrique du Sud ou en RDC. « Formés sur place par un mentor ou à l’étranger, nous sommes tenus de nous améliorer grâce aux enseignements sur Internet », insiste l’entraîneur.
Un traitement préventif ?
Du reste, beaucoup se disent soulagés par la pratique régulière du sport. « C’était irrespirable ici au plus fort du confinement (avril décembre 2020, NDLR). Nous étions comme prisonniers. C’est le sport d’abord à domicile qui m’a permis de tenir, confie Fortune Mabiala. J’y ai pris goût et aujourd’hui je m’entraîne dans une salle de sport à Songolo (quartier de Pointe-Noire, NDLR). Je n’imagine pas ce que je serais devenu sans la pratique du sport ».
Toujours est-il, qu’au-delà des bienfaits psychologiques du sport en cette période de pandémie de COVID-19, le coach sportif considère cette activité comme une véritable alliée.
« Le sport n’est pas seulement à pratiquer à titre curatif, conseille le coach Desty. (…) J’encourage ces personnes là (qui n’ont pas cette motivation) à ne pas attendre que le médecin leur dise de faire du sport. Il ne faut pas attendre d’avoir un A.V.C. pour s’y mettre.»
Actuellement, de nombreuses entreprises congolaises ferment, du fait d’une situation économique chancelante, avec pour conséquence la disparition des emplois. Une situation favorable au coaching sportif, surtout en cette période morose. Optimiste, le coach Desty Nzila, encore consultant dans diverses salles de sport de Pointe-Noire, veut se lancer dans l’entrepreneuriat. « Dès l’année prochaine, insiste-t-il, j’ouvrirai trois salles de sport à Pointe-Noire et Brazzaville ». Pour cela, il faudra attendre l’autorisation du délégué départemental des Sports et de l’Éducation physique du département de Pointe-Noire. Il devra alors vérifier « la viabilité des infrastructures, le savoir-faire des coachs, ainsi qu’une police d’assurance, notamment ».
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