Yanick Folly valorise le quotidien des Béninois à travers la photo
À Ouidah (Bénin), le photographe Yanick Folly virevolte pour prendre les meilleurs clichés au cours d’une cérémonie vaudou (crédit : Alexandra Vépierre)
Le photographe Yanick Folly arpente villes et campagnes pour immortaliser le quotidien et les savoir-faire traditionnels des Béninois. Son objectif : partager la culture de son pays et raconter des histoires inédites à travers l’image.
« Bonjour les amis, je m’appelle Yanick Folly, je suis chasseur d’images. Et c’est parti, let’s go ! ». À peine terminé le dynamique préambule qui introduit chacune de ses vidéos, Yanick Folly entre en scène armé de son appareil photo. Sous la chaleur étouffante de Ouidah (Bénin), il couvre une cérémonie vaudou. Difficile de suivre l’infatigable photographe béninois tant il court, virevolte, s’allonge afin de varier les angles et capter le cliché qui fera sens.
Avec ses plus de 14 000 abonnés sur Instagram venant du monde entier, le « chasseur d’images » a à cœur de partager la culture de son pays avec le plus grand nombre. Sur ses réseaux sociaux, les portraits d’enfants s’intercalent entre les vidéos de danses traditionnelles et les instantanés de scènes quotidiennes. Consultant pour UNICEF Bénin, il est également photojournaliste pour L’Agence France Presse (AFP), et ses photos illustrent les articles de Libération, El País ou du Washington Post.
Mais c’est au contact de la population que le photographe s’épanouit le plus. Né à Cotonou il y a 35 ans, il n’y réside jamais vraiment et préfère sillonner les routes béninoises sur sa moto. « Lorsque j’étais aux États-Unis, je devais sans cesse expliquer où se trouvait mon pays, car personne ne le connaissait. Pourtant, le Bénin est d’une richesse incroyable et c’est ce que je souhaite montrer à tous », raconte Yanick Folly.
Lorsqu’il repose son boîtier, l’énergique photographe se révèle calme et profondément humaniste. « Quand j’arrive dans un village, je ne sors même pas mon appareil. Je discute avec les gens, j’aide pour les travaux champêtres et je joue au foot avec les enfants. Lorsque je vois qu’un lien se tisse, je demande l’autorisation de prendre des photos, mais si les personnes refusent, je n’insiste pas ». Très loin des musées, Yanick Folly revendique un art accessible à tous. Une fois ses photos imprimées, il revient dans les villages avec du fil et des pinces pour installer de petites expositions. « Dans le nord du pays, certaines personnes ne se sont jamais vues en photo. Elles sont ravies de voir leur famille, leur maison ». Parfois, il apporte aussi du riz, de l’huile et des jouets pour les enfants, comme il le fait chaque Noël depuis 9 ans.
Travail et détermination
S’il est aujourd’hui la référence de la photographie béninoise, le chemin a été sinueux. Discret sur sa vie privée, il admet avoir passé une enfance solitaire. Enfant unique placé en internat, il rêvasse devant les films de Jackie Chan et se passionne pour l’audiovisuel. Un goût que ne partage pas sa famille, qui préférerait le voir médecin ou banquier. Mais mû par un farouche esprit d’indépendance, le jeune Béninois n’en démord pas. N’ayant pas les moyens d’entrer en école ou d’acheter un ordinateur, il travaille d’arrache-pied pour une agence de communication – qui ne le rémunérera jamais – et passe ses nuits au bureau à se former à la photo via les tutos YouTube. Quand il touche enfin à un boîtier, c’est la révélation pour le jeune photographe fasciné par Steve McCurry et Sebastião Salgado.
Il enchaîne alors les concours photo, gagne plusieurs prix, puis se fait repérer en 2016 alors qu’il prend des photos sur le marché Dantokpa à Cotonou : l’AFP, dont il n’a jamais entendu parler, cherche un correspondant pour le Bénin et le Togo. Enfin, en 2017, il a l’opportunité de suivre des cours aux États-Unis, ce qui change considérablement son rapport à l’image. La machine Yanick Folly est lancée.
Malgré sa notoriété, les fins de mois restent parfois compliquées. Mais ne lui parlez pas de se tourner vers les photos de mariage : « Je ne fais pas de photos de mode, je suis un photojournaliste avant tout et je dénonce ce que je vois », soutient Yanick Folly. En 2015, il publie les photos d’un village du nord du pays, où les enfants n’ont pas accès à l’eau potable et boivent de la boue. « Ce cliché-là a fini par faire le tour du Bénin et j’ai commencé à recevoir des menaces. La question est devenue politique », raconte-t-il. Le photojournaliste s’est déjà fait arrêter par la police alors qu’il prenait des photos, mais il accepte les risques avec abnégation.
Ses moments d’accalmie, il les passe dans son écoferme où il profite de son amour pour la terre et les animaux. Mais jamais trop longtemps. Aujourd’hui, ses objectifs sont clairs : il veut travailler pour l’agence de presse américaine Magnum Photos et gagner le World Press Photo. « Là, j’aurai réussi tout ce que je souhaite », s’enthousiasme le photographe. Néanmoins, il reconnaît avec humilité être fier de lui : « Énormément de personnes visitent le Bénin grâce à mon travail. Même si je ne suis jamais récompensé pour ça, mes photos parleront pour moi ». Et de conclure : « Dans cent ans, elles resteront une trace ».
Pour découvrir son travail : https://www.instagram.com/yanickfolly/?hl=fr
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